Baignade dans un univers de likes

Le buzz s’est imposé comme un phénomène incontournable : tout ce qui accroche l’attention file de main en main, se propageant en un éclair à travers les écrans. Mais cette viralité fulgurante, en bousculant notre façon de penser et de nous informer, n’est pas sans conséquences troublantes. Les médias, d’abord porteurs de récits et de faits, semblent désormais tourner le projecteur sur eux-mêmes : ce n’est plus tant le contenu qui importe, mais l’effet de sa diffusion.

Dans cet univers de « likes » et de partages compulsifs, le média s’érige en héros. La notion même de véracité semble fléchir, et l’information devient souvent une simple étincelle, suffisante pour embraser nos émotions, mais insuffisante pour nourrir notre réflexion. Les contenus viraux, trop souvent, ne sont pas ceux qui nous poussent à la nuance, mais ceux qui nous happent par leur intensité immédiate. Ce mécanisme rappelle le sinistre Ministère de la Vérité d’Orwell dans 1984, où l’État façonne la pensée commune en manipulant les faits.

Même sans une main autoritaire, l’engrenage du buzz nous entraîne vers une pensée sans relief, sans contradiction, où les voix divergentes peinent à s’élever.

Dans un tel contexte, le discernement devient un véritable acte de résistance.

La tentation est grande de partager ce qui nous touche sans prendre le temps de s’interroger, au risque d’alimenter une uniformité des idées. Alors, comment préserver un esprit critique face à cet océan d’informations, qui semble vouloir nous dicter quoi penser ?

Il est possible de s’imposer quelques filtres, de simples questions avant de relayer : d’où vient cette information ? Pourquoi cherche-t-elle à capter mon attention ? Quelle est ma propre réaction face à elle ? Partager avec plus de conscience, c’est déjà contrer le flot des certitudes instantanées. 

La montée du buzz réduit la complexité des idées.

Car en vérité, la montée du buzz et de l’information virale menace un pilier de l’humanisme : elle réduit la complexité des idées, nous incitant à des réactions simplifiées, et met en péril cette profondeur et cette diversité de pensée essentielles à une société éclairée. Ainsi, le buzz, bien qu’il soit tentant, peut se révéler une embuscade. Il peut cependant, paradoxalement, devenir un chemin pour affiner notre esprit critique. Choisir de revenir à une posture d’interrogation face à chaque flot d’informations, même dans l’immédiateté frénétique des réseaux sociaux, est sans doute le meilleur moyen de préserver nos pensées de la tyrannie du bruit — et d’éviter, comme chez Orwell, que nos perceptions soient façonnées par l’éclat fugace de ce qui crie le plus fort

Debora Ohana

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