C’est la chanson de Calogero « suis-je assez clair ? » qui m’a interpellé sur notre comportement inconscient vis-à-vis de toutes ces personnes qui rendent notre quotidien vivable. Qu’ils nettoient nos bureaux avant l’aube, s’occupent de nos enfants pendant que nous travaillons, construisent nos maisons, débarrassent nos poubelles, font la plonge dans les restaurants ou la toilette de nos anciens dans les EPHAD, etc, nous ne voyons jamais et que, quand bien même nous les voyons, nous ignorons gentiment tous ces frères et sœurs en humanité.
Si la crise du Covid nous a fait réaliser à quel point ils sont importants dans nos vies, sitôt la crise passée, nous avons repris nos vieilles habitudes et à nouveau détourné le regard de tous ces êtres, les rendant ainsi invisibles. Et pourtant, ils sont bel et bien là. Tout aussi présents que nous, respirant le même air, ressentant joies, peines, inquiétudes, satisfactions…, rentrant le soir retrouver leur famille et s’inquiétant de l’avenir de leurs enfants. Comme nous. Comme tout le monde. Comme tout parent.
Cette invisibilité m’a toujours été insupportable et, depuis aussi longtemps que je puisse m’en souvenir, je me souviens de l’air du balayeur du parking de mes parents, étonné que je lui dise bonjour, des ouvriers sur le chantier de rénovation de mon appartement, visiblement peu habitués à ce que les clients leur serrent la main, des hommes et femmes de ménage de mes différents bureaux, surpris que je leur fasse un petit cadeau à Noël, de tous ces hommes et ces femmes que je croise et que je remercie tous les jours de la joie qu’ils me procurent en me souriant à cause d’un simple « bonjour ! ». Mais je ne peux témoigner des nombreux, des probablement si nombreux visages de celles et ceux que j’ai croisés et à qui je n’ai, moi non plus, pas prêté la moindre attention.
Je reviens à cette chanson de Calogero que je nous invite donc à écouter ou à ré-écouter : suis-je assez clair ? Ou suis-je assez transparent et invisible ? Nous pouvons participer à rendre un peu plus humaine cette société en rendant leur dignité à toutes celles et ceux que nous invisibilisons malgré nous.
William Cargill